Depuis 1985, Lili Leignel, née Rosenberg, parcourt les établissements scolaires de la région mais aussi de la France. Elle en visite près de 70 par an. « Je suis tout le temps sollicitée », sourit-elle. Car c’est avec plaisir que la rescapée rencontre des centaines de jeunes, qu’elle appelle volontiers « mes enfants », pour leur partager son histoire. Un discours poignant qui prône la tolérance et la prudence. Le but : que ces jeunes puissent, à leur tour, témoigner.
Qu'attendez-vous de toutes ces rencontres ?
Elle n’avait que onze ans. La nuit du 27 octobre 1943, Lili Leignel quitte Roubaix dans la peur avec sa mère et ses deux frères, Robert et André. Porteurs de l’étoile jaune, des Allemands sont venus les arrêter. La famille, originaire de Croix, est envoyée dans la prison de Loos, puis dans celle de Malines, en Belgique, avant d’être transférée dans le camp de Ravensbrück, pour finir par Bergen Belsen, en Allemagne. Le 15 avril 1945, les soldats anglais libèrent le camp.
A 85 printemps, ou « 58 à l’envers » comme elle aime le dire, Lili Leignel n’a rien oublié de cette période de sa vie. Des années d’horreurs, où la jeune nordiste a perdu toute son identité ; elle ne répondait qu’à son matricule allemand. Elle a connu la déportation dans les wagons à bestiaux, les poux, la puanteur, les cadavres jetés dans les fosses communes. Simplement parce qu’elle était juive.
Depuis plus de trente ans, Lili Leignel raconte inlassablement son histoire, dont le souvenir est toujours vivace, « pas pour faire pleurer, mais pour que cela ne se reproduise plus ». Une histoire glaçante qu’elle partage sans haine aux plus jeunes. « Mon but, c’est de leur transmettre un message de tolérance. Voilà ce que je fais du mal que l’on m’a fait. Il faut que ces souffrances servent à éviter de nouvelles guerres. J’ai foi dans les jeunes. Ils sont la France de demain. »
Son message est poignant, mais avant tout bienveillant : « Soyez vigilants et courageux, lance-t-elle aux centaines d’élèves qu’elle rencontre. Tout peut revenir sous une autre forme. On ne construit rien avec la haine et la xénophobie. »
En revenant des camps, Lili Leignel a ramené avec elle des chansons que seule elle connaît. Des chansons qu'elle a apprises phonétiquement et dont elle a découvert le sens après coup.